Stop & Go, annule et remplace : les cycles de l’entreprise d’aujourd’hui

Cet article s’inscrit dans le prolongement naturel du dernier paru sur le blog . Car des maux de l’entreprise à ses cycles, il n’y a qu’un pas…

De là à y voir des « Maux-dits » cycles, faits de hauts et de bas (débats)…

En tous cas, et contrairement aux vélos du même nom, pas sûr que les cycles dont nous allons parler ici cette semaine, fassent au final avancer nos entreprises.

C’est même parfois plutôt le rétropédalage garanti !

Quitte à nous crever, nous faire tourner en rond… ou nous mettre à plat…

Mais regardons tout cela de plus près.

 

cycle

Des cycles d’hier…

Cycle : nom commun masculin, décrivant la durée de temps nécessaire au déroulement complet de certains processus (Wikipédia)

Je vous renvoie ici à vos chères études.

S’il vous reste quelques bribes du programme de lycée, vous vous souvenez vaguement des économistes célèbres qui ont théorisé et modélisé les grandes évolutions économiques. Tentant par la-même d’expliquer l’inexplicable, ou de mettre un peu de raison là où semble régner le désordre et le chaos.

Note amusée : alors que l’entreprise avec ses cycles, semble avoir la volonté de mettre du chaos là où subsistait encore un peu de raison.

Allez, va, je suis moqueur 🙂

Reprenons.

  • Cycles Kondratieff (cycles économiques de 40 à 60 ans)
  • Cycles Kuznets (de 15 à 25 ans)
  • Cycles Juglar (de 8 à 10 ans)
  • Cycles Kitchin (de 3 à 4 ans)

Notons que ces cycles s’inscrivent dans la durée, et qu’à cette période, la gouvernance d’entreprise répondait peu ou prou à une même logique, symbolisée par l’entrepreneuriat familial, de père en fils.

Incarnée par le visage du « patron » fondateur, aussi craint que respecté.

On en prenait pour quelques années, souvent 20, rarement moins

 

 annulation

… Aux Cycles d’aujourd’hui

Une fois de plus, force est de constater que tout s’accélère.

En 2016, l’immobilisme, le statut-quo sont désormais perçus comme l’ennemi à abattre.

‘Hier’ et ‘avant-hier’ constituent d’encombrants et inutiles bagages : « c’est le passé »…

Pas de « temps à perdre ». La décennie n’est assurément plus un repère acceptable, le septennat a vécu, le quinquennat est même menacé (dans sa dimension renouvelable).

Faire, défaire, refaire… sacrifier à l’humeur du moment… suivre le trend. Quitte à parfois réinventer l’eau chaude (et s’en féliciter !). Copier, imiter.

Regardons attentivement les grands mouvements de l’entreprise d’aujourd’hui.

Il y a d’abord ces cycles de 2 à 3 ans maximum. Ils se succèdent, invariablement, souvent avec les changements d’équipes dirigeantes.

 

demi-tour

Externalisation PUIS internalisation : faire ou faire-faire. Sous-traiter ou internaliser la compétence, dans une logique d’efficacité et/ou de réduction des coûts.

Centralisation PUIS décentralisation : renforcer l’autonomie des régions, des établissements de l’entreprise sur son territoire, au plus près des équipes et des clients. Ou au contraire, renforcer les modalités de contrôle, les procédures, les process.

Stratégie du ‘Small is beautiful’ PUIS stratégie de ‘la taille critique’ : mouvement intimement lié au précédent. Faire successivement le pari de l’agilité, puis celui de la stratégie de puissance, d’occupation du territoire. Jouer la carte de l’outsider en mouvement permanent, ou du mastodonte qui sature son marché. Se développer à outrance, dans une posture expansionniste assumée à coups de mètres carrés, ou jouer la niche différenciante.

Recentrage sur son cœur de métier PUIS diversification de son portefeuille d’activités : ou lorsque les jardineries se lancent dans l’alimentaire, les banques dans l’assurance, alors que d’autres entreprises font dans le même temps le choix de l’ultra-spécialisation.

Retour aux basiques PUIS encouragement de l’innovation : c’est « la querelle des Anciens contre les Modernes » revisitée. D’un côté le terroir, les racines, la tradition, le retour aux origines : « brasseur depuis 1895 », « agitateur d’idées depuis 1945 », « depuis 100 ans »… De l’autre, la rupture, la carte du renouveau, ou comment se réinventer en permanence, créer son propre marché.

« Tout pour le chiffre d’affaires » PUIS « tout pour le résultat et le bas de page » : croître, se développer, élargir sa zone d’influence à tout prix. Ou rentrer le ventre, faire le dos rond, maîtriser ses coûts. Ces 2 cycles là se succèdent invariablement, car les excès du 1er entraînent mécaniquement l’impérieuse nécessité de l’autre.

‘Staffing’ PUIS optimisation des organisations : ce cycle est la conséquence logique des précédents. C’est la chasse aux économies, à la rationalisation, c’est le comptage des ETP (Equivalents Temps Pleins) en fin de mois (avec la cible correspondante), la suppression des strates hiérarchiques perçues comme non pertinentes. Ou bien c’est le recrutement de nouvelles compétences, l’investissement en heures et en talents pour accompagner la croissance. Pour ces recrutements, j’aurais d’ailleurs pu développer ici le cycle promotion interne / enrichissement des compétences de l’entreprise par des recrutements dits « extérieurs », mais ce serait abuser…

Vous pouvez les considérer dans l’ordre qu’il vous plaira. Ils se succèdent dans un sens puis dans l’autre.

Mine de rien, nous avons déjà, sans que cela soit exhaustif, évoqué 7 cycles, pour ceux qui suivent 🙂

Je vous ai fait grâce du cycle de vie du produit (conception, lancement…), du cycle de vie du marché (croissance, saturation, déclin)…

Tous ces cycles ont en commun d’être désormais éphémères, fragiles.Et renversants ! Gare à la casse.

haut-bas-fragile

Ce n’en est pas pour autant fini. Car chaque année civile est également porteuse, par nature, de cycles secondaires, que les femmes et hommes d’entreprise connaissent bien.

  • Cycles budgétaires (préparation, ouverture puis fermeture des budgets)…
  • Cycles boursiers (quarters, S1, S2)…
  • Cycles de reporting (AG, rapport annuel, reporting extrafinancier)…
  • Cycles sociaux (reunions DP, CE, CCE, CHSCT)…
  • Cycles du dirigeant (et de son Codir/Comex)…
  • Cycles de travaux
  • Cycles d’investissement
  • Cycle de projet...
  • Cycles de management, tantôt participatif, tantôt directif…

perdu

 

Des cycles à la roue libre…

Ces cycles viennent percuter les actes managériaux, la prise de décision, l’exercice de la fonction de tout un chacun.

Avec la quasi-certitude de tomber à côté et de se faire remarquer dans le mauvais sens du terme : « avant l’heure c’était pas l’heure, et après l’heure, c’était trop tard ».

Dans ce contexte fluctuant, de va et vient, de flux et de reflux, chacun est comme incité à prendre de moins en moins d’initiatives, à rentrer dans le rang, en se souvenant que « c’est sur le clou qui dépasse que tombe le marteau »…

 D’abord faute de savoir où l’on va, ce qui rend compliqué d’orienter son effort dans la bonne direction.

Ensuite car l’on se dit qu’un cycle va succéder à l’autre rapidement, qu’un nouveau dirigeant va bientôt succéder à celui-ci. Alors à quoi bon perdre du temps et de l’énergie : l’annule et remplace ne va pas tarder… et une « note d’information » viendra vite annoncer le départ du chef actuel et la nomination de son successeur, à qui nous souhaiterons comme il se doit « pleine réussite dans ses nouvelles fonctions » (sic).

La succession des cycles devient alors spirale descendante, qui peut tout à fait être celle de la défaite.

  mesure

De la constance et de la mesure…

Le cycle est bien connu de certains clowns au cirque… 

Le cycle, c’est aussi la racine de cycle-otimique…

Alors, pour éviter un spectacle hilarant ou désolant, faisons le pari de la mesure.

Dans d’autres domaines qui nous sont familiers, nous ne le savons que trop bien : les à-coups en matière de conduite et de pilotage se traduisent invariablement par une sortie de route ou un décrochage.

Optons donc pour le réglage fin, les corrections et ajustements par petites touches.

Ajustons progressivement la puissance.

Adaptons l’intensité de nos actions. Si possible, rendons les synonymes de constance, de régularité.

Le marché, les équipes, les parties prenantes de l’entreprise dans l’ensemble n’aiment guère les surprises, pas plus qu’elles n’apprécient d’être maintenues dans l’incertitude. Soumises à l’aléa.

Faisons le pari de la progressivité, et souvenons-nous pour conclure quil existe un cycle en forme de roue, qui pourrait bien être celle de la fortune pour qui sait s’en servir à propos. La roue du bon sens.

 

roue-deming

 

Bonne semaine et merci de votre fidélité.

Source images : emaze.com, youtube.com, babelio.com, digitaldjtips.com, asiafreeforum.com, ya-too.com

 

 

 

One thought on “Stop & Go, annule et remplace : les cycles de l’entreprise d’aujourd’hui

  1. Sans parler du re(cycle)age des modes managériales… Ce billet m’a indirectement permis d’apprendre que le mythe de Sisyphe (qui comptait certainement parmi les tous premiers managers) fait aussi partie du « cycle de l’absurde » dans l’oeuvre d’Albert Camus : merci M. VILCOT !

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