Droit de regard !

J’ai cette conviction que l’essentiel passe par le regard.

Communication, reconnaissance, esprit d’équipe, motivation : le regard dit et fait beaucoup.

L’entreprise, c’est par essence la confrontation des regards : dirigeants d’hier et d’aujourd’hui, managers, équipes, partenaires sociaux, parties prenantes de la gouvernance, agences de notation….

Chaque enjeu stratégique, par essence complexe, ne peut désormais être abordé qu’en croisant les regards, de manière transverse et pluridisciplinaire.

Et dans le même temps, tout bouge, tout change : il faut en permanence accommoder notre vision, ajuster notre regard.

Voici donc pour cette semaine de 15 Août un article en forme de clin d’œil, pour ouvrir les yeux !

A ma droite, ceux dont on se passerait bien :

les regards de travers !

Nous ne les connaissons que trop bien !

Le regard dans le rétroviseur : « c’était mieux hier ». Nostalgie inhibitrice. Recroquevillé sur son passé, sur un âge d’or révolu : « les grandes années de l’industrie pétrolière », « les années folles de la distribution ». C’est le regard du rabageois, de l’historien déconfit.  

Le regard sur la montre : on n’a plus le temps de rien. Et l’on s’en persuade ! Pendant notre réunion, on prépare celle d’après. Dans celle qui suit, on s’attelle au compte-rendu de la précédente. On court après les mails, les calls… Certains managers ont ainsi inventé, je vous le jure, le rendez-vous 7 minutes, petit réveil digital à l’appui, posé sur le bureau et bien visible des participants.

Il y a aussi, de plus en plus, « crise » oblige, le regard baissé, les yeux sur les chaussures : on n’y croit plus ! Alors que le regard devrait se porter sur l’horizon et les étoiles. Arrêtons de subir que diable ! Restons acteurs et arrêtons donc de nous complaire dans la léthargie du spectateur contraint  ! Variante de moindre intensité : le regard dans le vague, comme le terrain du même nom. Mais où va-t-on ? Justement, optons pour la longue-vue !

Les yeux au ciel ou les yeux fermés. Le regard qui se détourne. Par dédain ou déni. Fréquemment décliné dans le champ managérial : cachez-moi cette situation que je ne saurai voir ! C’est la poussière sous le tapis…. Qui finira bien par se soulever de lui-même, croyez-moi. Pour en faire un tapis volant. Gare à la chute.

Le regard hautain et dédaigneux, tout sauf bienveillant et protecteur. Lorsqu’il est accentué, devient un regard en coin. Franchement désagréable et contre-productif.

Le droit de regard. Lui, c’est l’œil inquisiteur, l’œil de Moscou. Ce regard qui se mêle de tout. A juste titre (audit, contrôle interne), ou dans l’excès. Attire en ce cas le regard noir. Se centre sur les anecdotes ou les détails, quitte à en perdre la vue d’ensemble : « mais comment cela a-t-il donc pu vous échapper ? » Terriblement chronophage. Cousin germain du regard « je t’ai à l’œil » : cet autrefois présentéiste où le suivi permanent des activités et va et vient de chacun dans l’entreprise était un job à temps plein. Les Millenials l’ont tué. Big Brother is not watching you anymore… Ou plus pour très longtemps.

Le regard-raccourci, « au 1er coup d’œil ». Précède généralement de peu l’interpellation sur le mode « tu as la vue qui baisse, on t’a connu meilleur ! ». Et les erreurs de déploiement, simplement parce que l’on a oublié, tout décideur influent que l’on soit, que le mirage est un phénomène naturel bien présent dans le désert. Va de pair, vous l’aurez compris, avec les phénomènes de trompe l’œil, et les miroirs déformants.

Le regard de travers : celui du tricheur qui louche sur la copie du voisin. Celui qui récupère et s’approprie les bonnes idées, les résultats obtenus. C’est, en 2019, le regard qui vous incite à ne pas en croire vos oreilles. Ne lui accordez jamais de confiance aveugle !

A ma gauche, les regards

« bon pied – bon œil » !

« L’œil vif et le poil brillant » 

Ce sont ces regards qui ont bien besoin d’un coup de pouce.

Les yeux qui pétillent : c’est le regard intense ! Espèce en voie de disparition. Quelques rares spécimens à sauvegarder à tout prix. Vraiment, je vous en conjure, prenez soin d’eux dans vos équipes, dans votre entreprise, après les avoir croisés.

Le regard de l’autre. A accepter sans modération pour changer de perspective et confronter ses points de vue. Oser le regard éclairant, inspirant. Tel que celui de nos clients, de nos candidats, de nos parties-prenantes. Acceptons davantage que l’on pose le regard sur ce que nous faisons. Nous avons toujours à apprendre d’un œil neuf sur nos pratiques. Tiens, au fait, depuis combien de temps n’avez-vous pas sollicité le regard sans concession de vos clients ?

Le regard au fond des yeux. Comme dans suivre du regard. Consolider, aller au bout des choses. Pour en finir avec le zapping et tous ces projets ouverts mais jamais menés à leur terme, faute de budget ou de conviction.

Le regard déterminé. Sûr de lui mais sans excès. Confiant et optimiste. Va souvent de pair (de paire) avec « cette force de penser que le plus beau reste à venir » (Jean-Jacques Goldman)

Le regard d’hier sur le monde d’aujourd’hui, et le regard d’aujourd’hui sur nos réalisations d’hier ! Source de réflexions fécondes. Car au final le temps en entreprise n’est peut-être pas aussi linéaire qu’on voudrait nous le faire croire, mais plutôt circulaire sous forme d’éternel recommencement et de cycles qui se ressemblent étrangement (stop & go, centralisation/décentralisation, autonomie accrue/contrôle renforcé, conquête/fidélisation…)

Le regard espiègle… mais où est donc passé l’humour en entreprise ? Ou cet art d’être sérieux sans se prendre au sérieux. Faîtes l’humour et pas la guerre oserais-je.

Le regard du lendemain matin (comme pour les rencontres amoureuses) : dormez parfois une nuit sur votre idée géniale. A l’aube, regardez-la avec une perspective nouvelle sans concession. On garde ou on jette ? « La nuit porte conseil » : cela vaut aussi en entreprise.

Le regard c’est aussi, littéralement, le puits, la profondeur. Une ouverture sur autre chose. Le regard ne ment pas, il révèle bien malgré nous ce que nous sommes, ce que nous ressentons.

Changez de lunettes ! Et changez votre regard : sur les gens en général, vos équipes bien sûr, et tous ces sujets qui se réinventent tels que la formation, le recrutement, le management, votre métier et l’entreprise. Il est encore temps.

Ne serait-ce que pour éviter l’aveuglement des certitudes.

Ouvrez l’œil, et le bon !

 « Alors regarde, regarde un peu, tu verras tout ce qu’on peut faire… » (Patrick Bruel)

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