Rapprocher (enfin) écoles et entreprises

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Rendre l’entreprise plus accessible

Regards croisés de 2 experts engagés

Dans mes fonctions locales, régionales, puis nationales, je me suis toujours efforcé d’agir concrètement pour une relation plus proche et plus confiante entre écoles et entreprises.

  • Tout d’abord en tant que directeur de supermarché (avec les écoles, collèges et lycées locaux pour des journées portes ouvertes au sein du magasin)
  • Ensuite en tant que Responsable RH régional (en développant des partenariats régionaux autour de l’apprentissage du CAP au Master 2)
  • En tant que Directeur du Développement RH (mise en place de partenariats écoles innovants)
  • En tant que Directeur du recrutement (en travaillant autour de la qualité d’accueil proposé aux candidats jeunes diplômés).
  • Mais également dans l’ensemble de mes mandats, que ce soit en tant que Président de CFA, Conseiller à l’Enseignement Technologique pour l’Académie de Lyon, ou au sein des Conseils d’Administration de l’Association des Diplômés EM Lyon et de l’Université Jean Monnet de Saint-Etienne.
  • De 2005 à 2012, j’ai également pu animer plus de 80 journées de cours sur des thématiques telles que le management d’équipes, le recrutement ou les ressources humaines (ci-dessous en Décembre 2009… regardez bien au fond et au milieu…)

  ESC St Etienne

Les liens écoles-entreprises constituent une pièce angulaire du Recrutement Responsable. Et il m’a donc semblé utile d’enfin se pencher de plus près sur la question.

Si, à ce stade, vous pensez que ces relations semblent devoir se résumer à la participation occasionnelle à tel ou tel forum école, ou à d’épisodiques actions de sponsoring d’associations étudiantes, voire à un jury annuel, vous prenez le risque de passer à côté de l’essentiel.

Eric et Olivier nous apportent un éclairage approfondi sur quelques pistes concrètes d’action.

Je les remercie pour leurs contributions.

Témoignage d’Eric Le Jaouen,

Président du MEDEF Loire, Vice-Président du MEDEF Rhône-Alpes

En France, l’Education Nationale et les entreprises se sont très longtemps observés avec méfiance, sinon défiance. Cette posture est à l’origine d’une situation unique dans les grands pays industriels : beaucoup de Français ne savent pas ce qu’est une entreprise, avant de décrocher leur premier poste. C’est une situation préjudiciable qui est à l’origine d’incompréhensions, de frustrations, parfois de déceptions, aussi pour les jeunes candidats que pour les recruteurs. Aucun parent n’imagine envoyer leurs enfants traverser l’océan sans, au préalable, leur avoir appris à nager en piscine. C’est pourtant ce que nous faisons avec des centaines de milliers de jeunes qui intègrent chaque année nos entreprises après le collège, le lycée, ou un cursus universitaire, avec pour seule bouée, au mieux, un stage de découverte professionnelle de 3 jours !

Comment faire évoluer cette situation ? Voici quelques pistes :

      1.  Comme pour les langues étrangères, il faut commencer l’entreprise le plus tôt possible !

Parmi les initiatives à développer, la semaine Ecole / Entreprise, organisée par le MEDEF Rhône-Alpes depuis 2000. Cette semaine permet aux collégiens et lycéens, ainsi qu’à leurs enseignants, de découvrir l’entreprise à travers de nombreuses actions de sensibilisation. Elle renforce les échanges et les liens de partenariat dans les Académies et suscite de nouvelles initiatives : visites d’entreprises, mini-entreprises, classe en entreprises … Parmi les nombreuses réalisations des Actions Ecole Entreprise citons notamment le Club DP3 (Découverte Professionnelle 3H) au sein duquel des collégiens de classe de 3ème découvrent le monde de l’entreprise, ou encore les Actions de réciprocité qui permettent à des chefs d’entreprise de passer une demi-journée dans un établissement, à l’initiative du chef d’établissement, afin de mieux connaitre les enjeux du système éducatif et de faire tomber les à priori.

L’Ecole forme de futurs citoyens qui évolueront dans un monde ouvert et globalisé dans lequel les entreprises tiennent un rôle central de création de richesse et d’intégration sociale. « Apprendre » l’entreprise le plus tôt possible n’est donc pas qu’un simple gage de réussite d’employabilité future ; c’est un enjeu de citoyenneté.

semaine_ecole_entreprise_1-1,5_231870.66 http://www.education.gouv.fr/cid56498/semaine-ecole-entreprise.html

      2.   Universités et entreprises : un mariage de raison

Il aura fallu attendre le début du XXIe siècle pour que l’Université Française se préoccupe officiellement de l’insertion professionnelle de ses étudiants. Mais en quelques années, que de chemin parcouru !

        A l ‘échelle d’un territoire l’Université est sans conteste l’établissement supérieur d’enseignement et de recherche qui forme le plus d’étudiants, très souvent issus de ce territoire, et dans une très large gammes de disciplines. Quelle richesse pour le monde socio économique de ce territoire ! Encore faut-il que ces deux univers trouvent une langue commune pour construire des projets.  Hors de nos frontières ce modèle assure pourtant depuis des décennies le succès des Universités anglaises, allemandes ou américaines les plus prestigieuses. Notre pays rattrape petit à petit son retard et les initiatives se sont multipliées ces dernières années. Citons par exemple les guides de compétences des licences généralistes et masters que le MEDEF Loire a réalisé à Saint-Etienne, la création de la Fondation de l’Université de Saint-Etienne, l’ouverture de formation spécialisée par métier …

      3.   Donner envie aux jeunes : le story-telling et les NTIC au service de l’alternance ?

Nous avons en France, depuis des dizaines d’années, le paradoxe d’un chômage de masse qui cohabite avec des centaines de milliers d’offres d’emplois non pourvues. Des classes d’enseignement généralistes surchargées face à des programmes en alternance aux débouchés assurés mais qui rencontrent des difficultés à attirer des élèves. Malgré les très nombreux salons, forums, initiatives en tous genres des organisations professionnelles, nous ne pouvons que constater que nous manquons encore de résultats dans la promotion de l’alternance.

Les nouvelles technologies, le web 2.0, les réseaux sociaux, sont de formidables outils de promotion et d’information avec lesquels il est désormais possible de diffuser des témoignages et histoires de vie. Outil formidable car il permet tout à la fois de toucher le plus grand nombre, mais aussi de s’adresser à chacun, élève, parent. Et comme il n’est pas de meilleure publicité qu’une belle histoire pour assurer la promotion d’une entreprise, d’une formation, ou d’un métier, nous pouvons réfléchir à de nouvelles voies pour « donner envie » qui passent peut-être par ce mariage NTIC et story-telling.

     4.    Rapprocher les postes à pourvoir des compétences des candidats

Le recrutement responsable, tel que le définit Thomas Vilcot, doit permettre de simplifier des pratiques et process qui existent aujourd’hui dans le recrutement ; supprimer des étapes dans le nombre d’entretiens ainsi que dans l’étude psychologique des candidats en particulier. C’est un objectif d’autant plus réaliste que le candidat a développé au préalable sa compréhension du marché de l’emploi, du monde de l’entreprise, ainsi que des connaissances et compétences nécessaires pour un poste proposé.

Ecole, alternance, Université, l’ensemble des possibilités données aux élèves et aux étudiants de se familiariser avec les entreprises et leurs métiers permet de faciliter et simplifier la fonction des recruteurs. Ces derniers, dégagés des codes et usages les plus basiques, peuvent ainsi concentrer leurs outils, leurs process, et leur attention sur l’essentiel : qui est en face de moi ?

 

Témoignage d’Olivier Bachelard, psychologue docteur, enseignant chercheur habilité à diriger des recherches, directeur délégué de l’Ecole Supérieure de Commerce de Saint-Etienne

 

Le recrutement responsable est bien une composante centrale de la RSE. Le Groupe CASINO est connu pour son engagement en matière de développement durable et ce n’est pas qu’une base line. Identifier, faire grandir des collaborateurs, les accompagner, sont des pratiques inscrites dans les gènes de l’entreprise, dont Thomas est le Directeur du recrutement.
A titre personnel, je pense qu’il est important d’aller plus loin dans la relation entreprise/école, au service des trois parties prenantes. Cette collaboration peut prendre différentes formes :
• La participation à des modules de formation comme par exemple le management d’équipe (n’est-ce pas Thomas !)
• L’ouverture de terrain pour conduire des recherches expérimentation, des cas pédagogiques
• La participation de cadres à des jurys
• L’offre de stage ou d’alternance
• Le financement d’actions type ascenseur social, bourses

Pour l’entreprise, les gains sont multiples :
1. S’interroger sur ses pratiques
2. Formaliser la réflexion
3. S’ouvrir sur d’autres logiques
4. Connaître de façon étroite les élèves
5. Renforcer son image auprès de cette cible.

Pour l’école, c’est un ancrage sur les différentes réalités d’entreprise :
1. Des enseignements en phase avec les problématiques de terrain
2. Des recherches appliquées porteuses de valeur ajoutée
3. Une pédagogie de l’engagement qui responsabilise les différentes parties prenantes
4. Une pédagogie critique fondée sur la documentation et la capacité de modéliser
5. Une ouverture aux autres logiques et cultures

Pour les élèves, c’est un gage d’employabilité :
1. Une connaissance fine des réalités de terrain
2. Des choix professionnels étayés
3. Des compétences actionnables
4. Un pied à l’étrier pour les stages et l’apprentissage
5. Un passage du savoir-faire au pouvoir-faire, source de bien être au travail, d’efficience et de qualité de service.

Vous l’aviez compris, je suis un convaincu !

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